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Dilater le temps pour mieux prédire les évènements extrêmes
Les instabilités et le chaos dans les systèmes physiques
sont des phénomènes aléatoires naturels, généralement très sensibles aux
fluctuations des conditions initiales, si petites soient-elles. Pour comprendre
ces phénomènes complexes et omniprésents dans la nature, les chercheurs ont
récemment eu recours à des expériences impliquant la propagation d’ondes
lumineuses et menant à la formation d’impulsions de durée extrêmement brève, de
l’ordre de la picoseconde (un millionième de millionième de seconde). En effet,
l’étude de ces phénomènes en optique présente l’avantage de se faire sur des
échelles de temps très courtes, permettant ainsi de mesurer un échantillon
représentatif d’évènements et de caractériser de manière fiable ses propriétés
statistiques. Cependant, bien qu’ayant permis des progrès sur la compréhension
des dynamiques liées aux événements extrêmes, ces études ont été faites jusqu'à
présent de manière indirecte, en raison du temps de réponse des détecteurs
actuels, trop lents pour capturer ces évènements rares.
Des expériences récentes menées à l’Institut Femto-ST à
Besançon ont permis de dépasser cette limite. Basée sur le principe d’une
lentille temporelle qui dilate l’échelle
de temps d’un facteur 100 tout en augmentant la résolution, cette nouvelle
méthode a permis aux chercheurs d’observer en temps réel des impulsions géantes
de lumière, avec une intensité plus de 1000 fois supérieure à celle des
fluctuations initiales de la source lumineuse, un laser. Ils ont utilisé pour
cela un effet papillon connu en optique sous le nom d’instabilité
modulationnelle qui amplifie, dans une fibre optique de télécommunications, le
faible bruit intrinsèquement présent dans le faisceau laser.
Ces résultats ont une portée qui va bien au-delà du domaine
de la photonique, puisque ce type de bruit de fond est généralement considéré
comme l'un des mécanismes qui pourrait être à l’origine des vagues scélérates
destructrices qui apparaissent de
manière soudaine à la surface des océans, mais également de bien d'autres
systèmes comme la dynamique du plasma dans l'univers primitif. La capacité à
dilater les échelles de temps en optique ouvre donc une nouvelle voie pour
l’exploration et la compréhension des nombreux systèmes de la nature pour
lesquels il est encore très difficile d'étudier les instabilités de manière
directe et ainsi d’obtenir des échantillons statistiques fiables.
Ces travaux impliquent des chercheurs du laboratoire Femto-ST:
Franche-Comté électronique mécanique thermique et optique - sciences et
technologies (CNRS/Université Franche-Comté/Université de technologie de
Belfort-Montbéliard/Ecole Nationale Supérieure de Mécanique et des
Microtechniques de Besançon). L’UTMB, l’ENSMM et l’université de Franche-Comté
appartiennent à la communauté d’universités et d’établissements « Université
Bourgogne Franche-Comté ».
Contacts :
Professeur John M. Dudley : 33(0)3 81 66 64 94
Thibaut Sylvestre : 33 (0)3 81 66 66 46
thibaut.sylvestre@univ-fcomte.fr